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05/06/2009

_L'année de la fiction_

L'année de la fiction 2003-2004 : Jean-Claude ALIZET (et al.) : Encrage (collection "Travaux" #49) : 2006 : ISBN-13 978-2-251-74139-0 : 639 pages (y compris plusieurs index) : 45 Euros en neuf pour un TP volumineux, d'occase pour une vingtaine d'Euros.

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Cette série d'annuels a, chronologiquement parlant, pris la suite de celle de Goorden (voir http://ghor.hautetfort.com/archive/2009/05/27/annuaire-bi...) qui elle-même succédait logiquement à celle de Goimard et Riche. Conformément au principe de l'annuel, il s'agit de lister les productions d'un (ou plusieurs) genres pour une ou plusieurs années. La spécificité de cette série est le rassemblement dans un même ouvrage de la couverture des genres de l'imaginaire (SF, Fantasy, Horreur), du Policier et de l'Espionnage.

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On notera que cette série est assez embrouillée en matière de format (les premiers sont de HC avec couverture simili cuir, les derniers sont des TP avec couverture glacée), de contenu (les 10 premiers couvrent chacun une année, chiffre qui passe à deux années à partir du onzième) et surtout de dénomination. En effet, le premier volume s'appelle L'année 1989 du Polar, de la SF, du Fantastique et de l'Espionnage, un titre qui est changé dès le suivant en L'année de la fiction : Polar, SF, Fantastique, Espionnage : Volume 2, alors que la page de garde porte L'année de la Fiction 1990 et le dos (la tranche) L'année de la Fiction / 2.

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Malgré ces changements d'apparence ou de titre, le principe d'organisation est toutefois resté assez constant. On trouve dans chaque volume une première partie qui décrit, genre par genre (en remarquant que la Fantasy est traitée avec la SF), les évolutions majeures durant la période considérée. Il s'agit principalement d'une vision au travers du prisme de l'édition (nouvelles collections, disparitions, changements de positionnement ou de dirigeants) plutôt qu'à celui du genre.

La partie principale de l'ouvrage est la liste commentée des parutions de l'année. Seuls les inédits sont commentés, pour les réimpressions ou rééditions le lecteur devant trouver l'annuel correspondant. La structure de chaque entrée comprend tout d'abord une partie des éléments bibliographiques habituels (TO, date de première parution, traducteur, collection et numéro mais pas d'ISBN, d'illustrateur ni de pagination). Suit un long résumé du livre (parfois presque une demi page sachant que le texte est organisé en deux colonnes) et une appréciation plus courte (entre dix et vingt lignes). Ces notices sont signées et présentées dans l'ordre alphabétique d'auteur puis de TF. Les anthologies sont à la fin alors que les essais ont disparu (en tout cas dans ce tome là). Le livre se termine par un index par titre (romans et nouvelles) et un autre par collection.

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Sans remettre en cause la qualité globale de l'ouvrage qui n'appelle guère de critiques tant en matière bibliographique (par exemple les sommaires des recueils sont détaillés) qu'en matière de qualité "physique" du produit (surtout pour les premiers numéros, chers mais luxueux), deux points structurels me font nuancer mon appréciation.

1) N'étant pas du tout intéressé par les littératures policières (et assimilées comme l'espionnage ou le thriller), je me retrouve face à un ouvrage assez onéreux mais dont je ne peux espérer utiliser qu'une petite partie (à vue de nez SF&F forment la minorité des parutions). Ceci explique d'ailleurs pourquoi j'ai acheté ces ouvrages d'occasion, le rapport utilité/prix étant, pour l'amateur de SF, bien peu intéressant. Comme j'aurais tendance à penser que la population de clients potentiels suffisamment riches et passionnés par tant de genres différents est très limitée, j'aurais trouvé une division en deux de l'ouvrage plus pertinente et plus conforme à mes attentes (en tout cas j'aurais acheté les yeux fermés celui sur la SF&F).

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2) Même s'il est guidé par un évident principe d'équité, j'avoue que le principe d'un traitement similaire accordé à tous les ouvrages entraîne une lecture parfois un peu pénible. Par exemple, il y a plusieurs pages passées à résumer en détail ("Début Décembre 2436, le Krest V, nouvelle nef amirale terranienne, rallie donc l'étoile Satys.") et à discuter des Perry Rhodan avec un enthousiasme qui fait plaisir à voir ("...conclut de façon éblouissante l'année Perry Rhodan 2004.") mais qui reste relativement peu justifié par des textes qui sont loin d'être des chefs d'oeuvre du genre. Cet espace important pris par des textes assez stéréotypés (il y a aussi tous les SAS et autres "Brigade Mondaine") se fait au détriment d'oeuvres plus ambitieuses qui auraient mérité et justifié une analyse plus approfondie. 

Le secret de la pyramide (FN 2003).jpg

Il s'agit donc là d'un produit dont le positionnement est un peu trop générique et pour lequel la volonté d'exhaustivité ou de transcender les genres est plutôt un point négatif. Des ouvrages compétents mais à trop large spectre pour un achat automatique.

Note GHOR : 1 étoile

02/06/2009

_"It" came from outer space : Occasional pieces 1973-2008_

"It" came from outer space : Occasional pieces 1973-2008 : Christopher PRIEST : GrimGrin Studio : 2008 : ISBN 978-0-9559735-6-7 : 245 pages (y compris index et bibliographie) : une vingtaine d'Euros pour un HC avec jaquette, signé par l'auteur, en neuf directement chez l'éditeur (http://spacetrader.org.uk/cp/grimgrinmain.htm).

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Cet ouvrage est directement édité par Priest lui-même via un prestataire de POD (ici Lightning Source) au sein d'un catalogue qui contient aussi de la fiction. Comme l'indique son sous-titre, il s'agit de la reprise en volume des divers écrits non-fiction de Priest : réminiscences, nécrologies, critiques...

Ce livre est organisé en huit parties rassemblant chacune plusieurs textes : "Fragments of a life" (éléments autobiographiques), "Lost friends and collegues" (nécrologies ou souvenirs relatifs à Cowper, Lem ou Scheckley), "Things that come along" (des critiques d'ouvrages divers, hors champ du genre), "An enthusiasm for H. G. Wells" (textes autour de Wells), "Some science fiction" (critiques d'oeuvres de SF, romans comme The snow ou films et d'ouvrages de référence), "Writings of war" (critiques d'ouvrages sur la 2GM, en particulier sur la guerre aérienne et sur Hess), "Books and writers" (des pensées sur l'édition et l'écriture) et "Distractions and occasions" (le reste).

Chacun des articles (dans la mesure des souvenirs de Priest) porte l'indication de sa première parution. L'ouvrage se termine par un index thématique et une bibliographie (ouvrages cités, étudiés, sur Wells et de Priest).

The snow (Gollancz 2005).jpg

Il faut tout d'abord souligner la qualité physique de l'ouvrage : jaquette illustrée, beau papier, reliure solide, police lisible. On mesure bien les progrès réel des impressions à la demande qui n'ont plus grand chose à envier aux éditeurs traditionnels.

Je serais plus nuancé sur le fond de l'ouvrage qui est clairement une compilation un peu fourre-tout des "autres" écrits de Priest. Même si c'est généralement intéressant et bien documenté comme la partie sur Wells, une bonne moitié de l'ouvrage n'a qu'un rapport lointain avec le genre et la section autobiographique proprement dite (qui pourrait servir à mieux cerner l'auteur) est finalement très réduite.

The separation (Gollancz 2003).jpg

Bien évidemment, je me suis focalisé sur la partie "Some science fiction" puisqu'elle est celle où la SF est centrale. On y trouve entre autre un article paru en 1981 dans Foundation, qui s'inscrit dans la "bataille des histoires de la SF" qui opposait dans ces années-là les tenants d'une histoire du genre américano centrée menés par Del Rey et Gunn et ceux d'une histoire britannico centrée autour de Aldiss. Cette querelle était liée à la parution proche de plusieurs histoires du genre ayant des approches très différentes que l'on pourrait qualifier de Gernsbackienne (pulps, fusées) pour l'une et de Wellsienne pour l'autre (littérature, inner space). Ici Priest s'attaque à Del Rey (pour The world of science fiction 1926-1976) dans une attaque au vitriol mais qui vire rapidement à l'attaque ad hominem (Del Rey en prend personnellement pour son grade) et à la tentative d'excommunication pour différence d'opinion avec une légèreté factuelle correspondante. C'est à la fois un témoignage historique d'une des nombreuses disputes qui animent périodiquement le genre mais c'est aussi, dans son excès, un article symptomatique de tout le livre.

The world of SF.jpg 

En effet, il se dégage de la plupart des textes de Priest qui figurent dans cet ouvrage une drôle d'impression. Une sorte de colère rentrée vis-à-vis des autres est toujours palpable et l'on pourrait facilement l'attribuer à une certaine jalousie. Cette ambiance de règlement de compte entre professionnels (par exemple Philip Reeve est attaqué pour avoir osé utiliser le concept d'une cité mobile) est finalement déplaisante de par sa motivation assez trouble. C'est dommage parce que Priest connaît bien le genre et a un oeil acéré mais n'arrive pas à écrire des critiques assassines (voir Langford ou Clute) avec le détachement nécessaire.

Un ouvrage pour complétistes de Priest mais qui ne fait pas beaucoup avancer l'histoire.

Note GHOR : 1 étoile

26/05/2009

_A Key to Fredric Brown's wonderland : A study and an annotated bibliographical checklist_

A Key to Fredric Brown's wonderland : A study and an annotated bibliographical checklist : Newton BAIRD : Talisman Literary Research : 1981 : pas d'ISBN : 62 pages (y compris diverses annexes) : une vingtaine d'Euros pour un fascicule soigné avec beau papier et illustrations, se trouve peu fréquemment pour cause de tirage limité (360 exemplaires).

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Cet ouvrage est un ensemble de documents relatifs à Fredric Brown, un auteur qui a toujours opéré sur plusieurs domaines (Policier, SF, Fantastique, Western...) sans jamais vraiment en privilégier un. Ce choix de carrière a d'ailleurs pu éventuellement lui porter préjudice et faire qu'il reste de nos jours un auteur connu des seuls amateurs éclairés.

L'univers en folie (RF 1953).jpg

Cette étude peut être divisée en deux parties principales, la première étant la plus documentaire avec successivement une courte introduction, une analyse de l'oeuvre de Brown par Baird, une chronologie très détaillée de sa vie, diverses réminiscences (par ses amis et sa deuxième femme) et un court billet d'opinion sur la religion de Brown lui-même.  La seconde partie est une bibliographie complète divisée en plusieurs sections suivant un canevas assez classique (livres, nouvelles, adaptations, poésie, bibliographie secondaire...). Elle couvre le domaine anglo-saxon mais aussi les parutions en d'autres langues et fournit pour chaque titre l'ensemble des informations pertinentes. Pour les romans, on  notera qu'un résumé est fourni. Suit un index assez difficile à utiliser (pas assez précis) puisque forçant à scanner toute une page pour trouver les mentions relatives à telle ou telle oeuvre.

Space on my hands (Corgi 1953).jpg

Hormis une manipulation assez peu intuitive, il n'y a pas grand chose à dire sur cet ouvrage dont la première partie n'est pas indispensable au vu de l'existence d'autres livres sur Brown plus complet et plus récents (le Seabrook par exemple). La partie bibliographique est exhaustive en particulier au niveau des adaptations mais souffre de son âge. Les quelques photos ou couvertures présentées sont d'un intérêt moyen et d'une rareté relative.

Project Jupiter (Digit 1964).jpg

Au final c'est un ouvrage de qualité, clairement le fruit d'une passion, mais qui ne réjouira que les complétistes de Brown. Son côté trop technique et trop à cheval sur plusieurs genres le rendant inadapté pour une découverte de l'auteur dans le cadre de la SF. 

Note GHOR : 1 étoile

25/05/2009

_Space Opéra ! : L'imaginaire spatial avant 1977_

Space Opéra ! : L'imaginaire spatial avant 1977 : André-François RUAUD & Vivian AMALRIC (et al.) : Les Moutons électriques (série La bibliothèque des miroirs) : 2009 : ISBN-13 978-2-915792-72-7 : 426 pages (y compris index et bibliographie) : 28 Euros pour un TP illustré (N&B + 4 pages couleurs) avec couverture à rabats (en neuf chez l'éditeur http://www.moutons-electriques.fr/).

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Cet ouvrage a pour objectif de dresser un panorama du "Space Opéra" jusqu'en 1977, cette date (celle de la sortie de Star wars) ayant été choisie comme marquant une rupture dans une catégorie emblématique de la SF. Cette catégorie, qui existe depuis les débuts du genre, est ici globalement prise (cf. le sous titre) comme celle des aventures dans l'espace, par opposition au Planet Opéra qui se concentre sur un décor planétaire précis.

Il se présente sous la forme d'une vingtaine de chapitres rarement inédits organisés dans un ordre vaguement chronologique et confiés à des auteurs différents (Nolane, Brèque, Wagner...) avec une contribution majoritaire du duo Ruaud/Amalric qui signe plus de la moitié de l'ouvrage. Certains chapitres sont plutôt génériques et abordent soit un thème (les serials) soit un domaine (les comics) mais la plupart des interventions se concentrent sur un auteur (de Smith à Delany) ou une série (littéraire comme Perry Rhodan ou télévisuelles comme Doctor Who ou Star Trek).

L'ensemble est illustré par des vignettes ou des pleines pages en N&B montrant généralement les couvertures des ouvrages évoquées dans le corps du texte. Il y a aussi 4 pages couleurs au début. Le tout est complété par une courte bibliographie (deux pages écrit gros), un index et quelques publicités pour d'autres ouvrages de même éditeur.

L'étoile en exil (FN 1969).jpg

Comme il y a pas mal de choses à dire, je vais tenter d'organiser mes remarques d'une façon un peu synthétique, en plusieurs points.

1) Où la passion du recyclage l'emporte :

Etant un garçon radin, ma première réaction a été de voir ce que j'obtenais pour mes 28 Euros, sachant qu'au départ l'ouvrage n'est pas physiquement d'une aussi belle qualité que ceux du même éditeur sur Anderson ou Heinlein (le premier étant à peine plus cher). Je m'attendais donc logiquement à ce que ces 28 Euros soient investis dans des efforts de recherche et d'écriture, mais il est vrai que j'étais un peu naïf vu que l'un des ouvrages précédents de Ruaud pratiquait déjà l'auto emprunt. Pour être clair, cet ouvrage fait plus penser à un patchwork qu'à une étude originale.

En effet, on constate que la préface de Klein est une reprise de 1992, que plusieurs (au moins Harness, Clement, Biggle, Kapp, Panshin) des chapitres du duo Ruaud/Amalric sont déjà parus dans Bifrost (où ils formaient la série des "petits maîtres de la SF"), que un des articles de Wagner (celui sur Thirion qui est aussi le plus long du livre) et celui de Vonarburg (sur La Plaie) viennent du recueil d'essais Le feu aux étoiles, que Brèque sur Anderson est un chapitre complet tiré de Orphée aux étoiles, sans parler d'emprunts non signalés comme des paragraphes entiers extraits tels quels de la postface de Ruaud au Chandler paru chez les moutons ou RAH chez le même éditeur (là, l'emprunt est toutefois signalé). Je ne parle pas des choses que je n'ai pu vérifier par pure flemme comme les possibles emprunts au Star Trek de Ruaud (encore) ou au Perry Rhodan de Archaimbault.

Le feu aux étoiles.jpg

Même si l'écologie et le recyclage sont à la mode et que ce léger détail est partiellement mentionné page 411 (en petit), je dois avouer une vague impression de m'être fait refiler des vieilleries au prix du neuf. Sentiment d'autant plus aigu que les "versions différentes" que l'on nous indique page 411 ne le sont en réalité que de façon minime. Les changements résidant essentiellement au niveau des introductions ou des transitions, le corps du texte restant strictement identique (et donc assez daté). Les seuls changements que l'on peut voir (j'ai comparé les textes entre eux) sont aussi profonds que, par exemple pour le Thirion, le remplacement de 60 par 1960 (au milieu de la première colonne de la deuxième page) ou le changement d'une référence pointant vers les article de Rémi Maure sur les arches stellaires vers (surprise) un texte de AFR himself. Il y a mieux puisque l'un des rajouts que j'ai pu détecter consiste à insérer des erreurs, comme page 279 où l'on nous dit en 2009 que le seul recueil de Kapp s'appelle Lambda 1, un élément omis dans l'article correspondant de Bifrost, ce qui n'était pas plus mal vu que Lambda 1 est en fait une anthologie qui ne contient qu'un texte de Kapp.

Il n'est bien sûr pas interdit de recycler son propre travail, mais à ce tarif, j'avoue que j'aurais préféré payer pour de l'inédit et non pour du réchauffé à la va-vite.

Cageworld Search for the sun ! (NEL 1982).jpg

2) Une histoire du SO par collage ? 

En toute logique, l'option prise de principalement réutiliser des textes existants a des impacts radicaux sur l'essence même de l'ouvrage. On a l'impression du glissement progressif d'un projet qui était une louable histoire du Space Opéra vers une compilation d'éléments existants plus ou moins libres de droits pour les auteurs (leurs propres textes par exemple). Au lieu d'une démarche historique classique et globale ("le SO commence là, puis il est devenu comme ça sous l'influence de XXX ou de telle ou telle chose...") on a une démarche de récupération ("Quels textes on pourrait utiliser qui ont un vague rapport avec le SO ?") qui se trouve donc fortement contrainte par les matériaux disponibles.

Orphée aux étoiles.jpg

Du coup, hormis dans les quelques chapitres sur des médias particuliers, il n'y a strictement aucune HISTOIRE du SO, aucune mise en perspective globale puisque la base du livre est une compilation de portraits d'auteurs. Par exemple, à aucun moment on ne sait quand a commencé le SO ou quelles sont les forces (économiques, éditoriales, sociétales...) qui l'ont façonné. Comme Ruaud n'avait pas fait d'articles sur eux, on se trouve face à un ouvrage sur le Space Opéra qui ne mentionne même pas des personnages aussi importants dans son évolution que Campbell (l'auteur), Leinster, Saberhagen ou Dickson (et on peut aisément en trouver d'autres).

Cette stratégie du recyclage nous vaut d'ailleurs quelques moments embarrassants où les auteurs peinent à justifier certaines inclusions comme Hal Clément ou Doctor Who, des éléments généralement peu associés d'une façon centrale avec le SO, le tout donnant lieu à des contorsions assez impressionnantes. Cela marche aussi dans l'autre sens avec les justifications alambiquées à l'absence de Vance ou Herbert ("c'est du Planet Opéra"). Le meilleur étant l'article sur Kapp dont la moitié finale traite de Manalone. Cette partie (La grande oeuvre, page 283) commence par dire clairement que ce roman n'est PAS un Space Opéra mais déroule quand même plusieurs PAGES de commentaires sur une oeuvre qui est, de l'aveu même des auteurs, complètement hors sujet.

Manalone (OPTA 1982).jpg

3) Une iconographie riche et rare ? 

C'est ce qui est écrit sur le premier rabat et c'est aussi l'un des pitch de la promotion de l'ouvrage. Effectivement, s'il y a bien une importante iconographie (plusieurs centaines d'images), elle souffre, à mon avis, de nombreux défauts.

Il faut dire que cela commence mal puisque les seules images en couleurs sont horriblement coupées (à dessein j'espère) et ne présentent que un petit quart des oeuvres originales. Le reste des illustrations étant en N&B on peut regretter que ces rares pages couleurs soient si mal utilisées. D'autant plus que cette absence de couleur et le traitement style "vignette" nuisent à certains illustrateurs, voir par exemple la comparaison de l'image ci-dessous (pourtant fortement compressée) et celle de la page 295 :

Stardeath (Del Rey 1983).jpg

On regrettera aussi l'absence quasi-totale de légendes en regard des illustrations (une habitude chez les Moutons) qui prive le lecteur d'éléments importants comme la date de parution puisque l'on ne représentait pas le SO en 1930 comme en 2000 et que ces choix sont eux-mêmes porteurs de sens sur (par exemple) l'image du genre auprès des lecteurs. Il est assez triste de voir que les illustrateurs ne sont presque jamais mentionnés, cette utilisation gratuite et non créditée de leur travail dans un produit destiné à être vendu me paraît assez désinvolte. De même, la qualité des ouvrages scannés laisse parfois nettement à désirer. Il arrive que l'on ne se soit même pas donné la peine d'ôter l'étiquette du prix apposée par un bouquiniste (par exemple sur le Brunner page 221), d'enlever des traces de colle ou de trouver un exemplaire dans un état décent.

Voilà pour la richesse, quant à la rareté, je peux juste dire que sur le millier de couvertures je dois facilement en avoir 75% (y compris en VO) et que je n'y ai vu que rarement des EO ou beaucoup de choses que l'on puisse qualifier de rares tant il y a de FNA, JL et autres PdF.

N'écoutant que mon bon coeur, si vous m'envoyez 28 Euros, je m'engage à vous faire parvenir un CD contenant plusieurs milliers d'images toutes aussi riches et aussi rares que celles contenues dans ce livre.

The altar on asconel (Ace Double M-123).jpg

4) Et c'est tout ?

Soyez rassurés, cet ouvrage pêche aussi dans de nombreux autres domaines.

On a tout d'abord la séquence publicitaire de l'éditeur qui réussit à placer presque tout son catalogue (je n'ai pas vu le PKD), y compris les zombies et même, grâce à une association d'idée fulgurante (Schmitz => médiéval => taverne => Shakespeare) Le panorama de la fantasy et du merveilleux (page 154).

On a aussi les coquilles (ClarkE Darlton, le frère d'Arthur), photes d'orthographe, notes inversées ou scories typographiques (des mots barrés) que l'on attend de cet éditeur.

Dans le même ordre d'idée, le sens si particulier de la chronologie de ces auteurs est aussi au rendez-vous avec des mentions de textes datant de bien après 1977, et (encore une surprise) l'habituelle mention de James Patrick Kelly.

Globalement, il vaut mieux parfois ne pas trop creuser les détails quand on lit des affirmations disant que (ce ne sont que quelques exemples) : The immortals de Gunn n'est pas traduit, que seulement trois nouvelles de Biggle existent en VF, que Van Vogt faisait partie de la Scientologie, que l'intégralité de Interstellar empire (Brunner) est parue en Ace Double ou que Karres (Schmitz) est traduit par Karès en VF. Autant de points, certes négligeables mais que quelques secondes suffiraient à corriger et qui, laissés tels quels, donnent un peu au cochon de payant l'impression d'un travail bâclé.

Les immortels (PC 1977).jpg     Les immortels (Le Masque 1978).jpg

Dommage pour une idée qui, traitée d'une façon un peu moins à l'économie, aurait fourni matière à un livre passionnant. Au final, les 28 Euros demandés sont largement prohibitifs pour la proportion réelle de matière inédite (même si certaines parties comme celle sur Doctor Who sont bien faites) et l'impression d'amateurisme de l'ensemble.

Note GHOR : 1 étoile (pour ceux qui n'ont pas accès au matériau original)

20/05/2009

_100 Chefs-d'oeuvre incontournables de l'imaginaire_

100 Chefs-d'oeuvre incontournables de l'imaginaire : Eric HOLSTEIN & Jerôme VINCENT & Thibaud ELIROFF : Librio (série Imaginaire, #909) : 2009 : ISBN-13 978-2-290-01586-5 : 122 pages (y compris lexique et index) : 2.85 Euros pour un petit TP (prix affiché de 3 Euros).

100 chefs-d'oeuvre incontournables de l'imaginaire.jpg

Continuant dans la même veine que les petits ouvrages proposés par les éditions Actusf, à savoir des livres pratiques et synthétiques à prix modique, cet ouvrage a pour objectif de nous faire découvrir les 100 chefs-d'oeuvre de l'imaginaire. Conformément à une mode récente, il groupe sous le même vocable ombrelle les catégories que l'on appelait avant SF, Fantasy et Horreur. Le pourquoi de ce changement de terminologie semble assez obscur d'autant que ces catégories (et leurs subdivisions classiques) réapparaissent dès la deuxième page et restent à la base de la classification utilisée par les auteurs.

La structure de cet ouvrage est très simple puisqu'il s'agit d'une suite de fiches consacrées à 100 livres ou groupes de livres (puisque l'on y rencontre des romans solo, des cycles ou séries et des recueils de nouvelles). Ces 100 textes étant ceux qui sont considérés par les auteurs comme des chefs-d'oeuvre incontournable (c'est écrit dans le titre). Cet ensemble est organisé chronologiquement (de 1770 à 2004) et chacune des fiches reprend une présentation standardisée : d'abord les informations classiques (titre, date, auteur, TO, traducteur, genre), un pavé d'une cinquantaine de mots qui présente l'auteur, un extrait représentatif de quelques lignes (par exemple le très connu début de Neuromancien) et la partie principale à savoir un résumé/avis sur le livre en une grosse vingtaine de lignes. On remarquera que les fiches ne sont pas signées.

Neuromancien (La Découverte 1985).jpg

Cet ensemble de fiches est précédé par une courte préface et est suivi par le traditionnel glossaire des termes et concepts propres au genre(s) (de Age d'or à Weird fiction) et de deux index (un par titre et un par auteur).

Cryptonomicon (Avon).jpg

Une fois certains maniérismes oubliés (le concept même de l'Imaginaire ou l'idée d'écrire science fiction sans tiret), la première (et légitime et amusante) réaction à ce type d'ouvrage qui se veut signaler les meilleurs éléments d'un domaine est de comparer les choix des auteurs avec les siens. En ce qui me concerne (donc plutôt sur la partie SF), même si je partage une partie non négligeable des choix (Demain les chiens, Fondation, L'homme démoli, Dune, Tous à Zanzibar, Un feu sur l'abîme, etc...) je suis, même avec mon expérience de ces best-of, assez surpris par d'autres. Des bouts de trilogies (Temps), des parties de cycle (Elévation), des séries à rallonge (Pern), des ouvrages mineurs dans la carrière de certains auteurs (Sans parler du chien) ou carrément d'auteurs mineurs (Un bonheur insoutenable). Mais je n'ai peut-être tout simplement pas saisi le côté ironique de la démarche qui fait mettre dans les 100 meilleurs ouvrages un livre dont on écrit qu'il est "Bordélique, mal ficelé, bourré de digressions" (Cryptonomicon).

Elévation T1 (JL 1995).jpg

Sur un autre plan, les amateurs de SF ayant la mémoire longue se rappelleront que Goimard et Aziza avaient été critiqués pour avoir inclus dans leur Encyclopédie de poche de la SF (1987) parue chez Presses Pocket une trop grande proportion de titres issus du catalogue de l'éditeur de l'ouvrage. Trouvant ici aussi certains choix surprenants, j'ai pu constater après vérification, que sur les 50 titres les plus récents, la moitié ont été à un moment ou un autre édités par J'ai Lu ou Pygmalion. Avoir 50% des incontournables parus dans ses propres collections, c'est une preuve d'un goût très sûr et un score remarquable pour un des co-auteurs de ce livre qui, je le rappelle, est publié par une autre des branches du groupe Flammarion (comme le sont J'ai Lu et Pygmalion). Après Ruaud & Colson qui réécrivent l'histoire de la SF à la sauce Moutons, on pourrait facilement en déduire que l'autopromotion reste une valeur sûre.

Encyclopédie de poche de la SF (guide de lecture).jpg

Il est logique de ne pas attendre de miracles d'un ouvrage d'un aussi petit prix, on a donc une quantité non négligeable (par rapport au peu de matière) d'erreurs factuelles (dates de parution du style 1940-1966 pour Slan ou 1997 pour Temps, TO) ou de typos. On peut y rajouter quelques affirmations assez légères : Je suis une légende faisant quelques dizaines de pages (19 dizaines pour l'édition PdF), Pavane comme texte fondateur de l'uchronie (dans les années 60 ?), le fait que nombre de romans de Willis n'aient pas été traduit en français (moins d'une demi-douzaine, tous mineurs) ou des reprises telles quelles de lieux communs largement discutables à la lumière de travaux sérieux (Les initiales de Moore comme cache-sexe, Asimov comme membre fondateur des Futurians).

Un ouvrage pas cher mais sans grand intérêt pour l'amateur, mais celui-ci n'est sans doute pas la cible visée. Le nouveau venu au genre pourra trouver une utilité à cet ouvrage à condition de réussir à trouver par lui-même quelles sont les éditions diponibles ou existantes puisque aucune information de cette nature n'est fournie.

Note GHOR : 1étoile